Jusqu’ici, j’ai beaucoup parlé de la ville, de ses activités, de l’énergie et de la frénésie qui s’en dégagent, et en tout cas que je ressens.
Mais la ville ce sont d’abord les gens qui y vivent, et surtout qui y travaillent, et que nous rencontrons tous les jours au gré de consommations de produits et de services en tout genre. Alors en ce 1er mai (au cours duquel nous n’aurons malheureusement pas pu respirer un seul brin de muguet…), c’est d’eux et d’elles dont je voudrais parler.
Depuis deux mois, le cercle de ces gens qui font vivre la ville n’a cessé de croître, renforçant d’autant plus le sentiment de familiarité à vivre ici.
Ils et elles sont magasiniers à la bibliothèque, surveillants sur le campus, chauffeurs de bus ou de taxi, caissiers chez Whole Food, Pioneer ou Jacob Soul Food, serveurs au Il Caffe Latte, au Harlem Shake ou au fameux Brooklyn Crab (où les crevettes aussi sont excellentes… !) ; ils sont vendeurs (et surtout débloqueurs…) de téléphones portables ; ils sont conseillers à Bank of America (inutile de préciser que jusqu’ici nous n’avons pas eu besoin de conseils en gestion de patrimoine mais seulement d’un compte courant…) ; ils sont cavistes (là, la liste est longue mais citons au moins nos « amis » de chez Pompette et BTL) ; elles vendent des vêtements dans des boutiques fancy près de Central Park, ou des sacs à main et des boucles d’oreille cheap sur la 125e ; elles vendent des cartes postales et des livres sur Harlem dans une boutique du quartier dissimulée sous un porche de Lenox Avenue; ils sont libraires (ça c’est un peu partout !) ; ils et elles sont professeurs de méditation, de yoga et de danse au Harlem Yoga Studio…La liste est longue, mais cette courte énumération vous donne aussi un aperçu de nos endroit préférés ou juste incontournables au quotidien.


Ces gens sont noirs, blancs, le plus souvent métissés. Ce sont des hommes et des femmes entre 20 et 50 ans, voire plus. Certains sont clairement des travailleuses et des travailleurs pauvres, d’autres appartiennent plus vraisemblablement à la classe moyenne, et certains sont plus difficilement « classables » : soit parce qu’ils sont suffisamment well off pour faire tenir une boutique qui ne vend visiblement pas plus d’un article par jour, soit parce qu’ils donnent bien le change, dans leur tenue vestimentaire ou leur manière de parler, soit parce que je ne suis pas assez fine sociologue pour jauger en quelques minutes leur origine sociale, et c’est sans doute l’hypothèse la plus probable.


Ces gens sont souvent des employés, même si certains sont à leur compte. Ces gens sont souvent des commerçants qui semblent tirer une certaine « fierté » à vendre leur marchandise, qu’il s’agisse d’une bouteille de vin ou d’une originale et importable paire de bottes (que j’ai donc achetée 😉 dans un magasin en pleine liquidation à Greenwich Village. Et même quand ils n’ont rien à vendre, ils (nous) rendent service. They take care.

Ce n’est donc pas qu’une question de pourboire ni de rémunération, car je pense aussi à des gens à qui on ne verse pas de tip et qui, sur le plan matériel, ne gagnent a priori rien à être particulièrement aimable. Sans doute que le caractère un peu exceptionnel de ce voyage m’incite à faire davantage attention à eux. Sans doute qu’être perçue la plupart du temps comme une touriste française les rend aussi plus indulgents et serviables à mon égard. Sans doute que je suis plus prompte à voir les aspects positifs de la vie ici qu’au fin fond des montagnes alpines (!). Promis, le prochain post portera sur tous les aspects « négatifs » de la vie ici 😉
Mais quelles qu’en soient les causes, mon ressenti demeure. Ces gens, aussi différents soient-ils, ces gens avec qui je ne boirai sans doute jamais un café, et dont je ne connais pas toujours le nom, ces gens sont sans doute les meilleurs VRP de New York quand on y reste un peu longtemps. Ils contribuent à transformer des interactions quotidiennes et apparemment anodines (qui souvent ne durent pas plus de quelques minutes, voire quelques secondes) en un moment d’échange qui fait du bien, qui se dépose quelque part, et dont le souvenir nous prendra par surprise à notre retour en France, quand les gens d’ici (re)deviendront ceux de là-bas.
Belle analyse et un regard sensible qui nous permettent de voyager. C’est un beau regard porte sur le monde et nouveau.
L’ouverture d’esprit de la population New Yorkaise ne parait pas faire de doute essentiellement du fait de son origine : »melting pot ».
cela étant dit,les pauvres, les moins pauvres, les classes moyennes , les riches et les inclassables se retrouvent dans toutes les grandes villes du monde entier .
C’est juste la perception des choses qui constitue la variable, ce que j’appelle souvent le « milieu environnemental ou l’épigénétique pour les plus scientifiques.
La perception est différente selon que l’on est touriste ou pas, de la saison, le printemps restant une saison idyllique partout dans le monde, et les conditions de vie locales .
Pour parodier ce chanteur français (Julien Clerc, je résumerai en le parodiant)
« les gens d’ici , ne sont ni plus grands ni plus fiers ou plus beaux , ils sont seulement d’ici …les gens d’ici ,comme cette mélodie »
Bravo pour l’essai littéraire en tout cas .
Respect
Merci John pour cette lecture attentive! La question du melting-pot est intéressante en effet. A Harlem, comme dans d’autres quartiers, pas sûre que les gens se mélangent tant que ça. Chacun reste « à sa place », mais par contre, les gens se rencontrent et sont en interaction, et ces interactions me semblent moins agressives ou indifférentes qu’à Paris ou d’autres villes de province. Prochain post à suivre sur la pauvreté new yorkaise précisément…