New York : l’étranger familier


Blog / samedi, mars 31st, 2018

« It is ridiculous to set a detective story in New York City. New York City is itself a detective story » Agatha Christie

Après un mois à New York, je me suis demandée comment répondre de manière un peu originale à l’injonction du « Alors, raconte ! ».

Je me suis dit qu’il fallait que je décrive le campus de Columbia, l’atmosphère de ses bibliothèques, l’océan de livres auxquels nous avons accès sur plus de dix étages à la Butler Library, les quelques deux cents journaux et périodiques du 3e étage, l’impressionnant Bookstore du Lerner Hall et notamment son rayon féminisme, la nourriture à profusion qui rend fou mon Parisien, et, cette semaine, l’affrontement des stands pro-Palestine et pro-Israël qui se sont faits face pendant plusieurs jours à grand renfort de slogans et surtout de panneaux d’information. Si les mots n’étaient pas pacifiques (loin de là !), aucun acte de violence ne s’est produit pour autant.

La Butler Library, Columbia University
Des livres, encore et encore…

 

 

Un rayon « féminin » au Bookstore de Columbia
Le stand pro-Israël
Le stand pro-Palestine

 

Je me suis dit aussi qu’il fallait que je parle un peu plus de nos week-ends (même si l’on croit à tort que les universitaires sont toujours en vacances… !) ;  évoquer le mémorial du 11 Septembre, la traversée en ferry entre Red Hook et le sud de Manhattan, la manifestation anti-armes March for our Lives du samedi 24 mars (l’une des plus importantes dans l’histoire des Etats-Unis), les interminables balades à Central Park et le long des avenues Broadway, Amsterdam et Columbus dans l’Ouest de Manhattan, la musique du Paris Blues, et les cours de guitare à Brooklyn…

 

Anti-armes, anti-Trump…
March for our Lives, samedi 24 mars 2018
La statue de la liberté, depuis le ferry qui nous ramène de Brooklyn à Manhattan
Une librairie à Brooklyn, sur le chemin de Red Hook

Enfin, je me suis dit qu’il fallait que j’arrête de parler de moi, de nous, et que je parle d’ « eux » : les Américain.e.s, les Afro-Américain.e.s, les Latino-Américain.e.s, les Asiatiques, les Européen.ne.s qui vivent ici, qui font vivre cette ville, de manière si différente d’un bloc à un autre et là, j’ai commencé à me dire que ce blog allait devenir rien de moins qu’une deuxième thèse ( !)

En fin de compte, j’ai décidé de partager un ressenti, celui que j’ai appelé ici « l’étranger familier ». Ce sentiment de se sentir chez-soi, même loin, même dans un autre pays, même lorsque les gens nous manquent. C’est bien sûr une question de langue : en anglais, nous nous « débrouillons ». Mais comme la majorité des gens que nous rencontrons viennent d’un peu partout, des Etats-Unis et d’ailleurs, la langue ne fait pas obstacle, car chacun la parle à sa manière et fait l’effort de (se) comprendre.

C’est aussi une question de lieu de vie : nous avons désormais nos « petites habitudes » à Harlem et des choses aussi anodines que faire les courses, aller prendre un café ou recevoir des gens « à la maison », fait que nous avons l’impression d’être ici depuis beaucoup plus longtemps qu’un mois.

Une petite faim? Just go to Il Caffe Latte (169 Malcolm X boulevard)

La familiarité est aussi celle des lieux vus tant de fois, dans tant de films et de séries. Pas plus tard qu’hier je dégustais un délicieux carrot cake dans le café Lalo où, pour les adeptes de comédies romantiques, se déroule la fameuse scène du quiproquo entre Meg Ryan (Kathryn Kelly) et Tom Hanks (Joe Fox) dans You’ve Got Mail. Et comme mes goûts cinématographiques sont l’objet de la plus grande consternation de la part de mon Parisien, je dois, pour me rattraper, aussi mentionner notre balade dans Greenwich Village, dans les pas d’Al Pacino et de son très touchant Chinese Coffee à l’occasion d’une rétrospective Pacino.

Tea time!

La familiarité est également celle du fonctionnement quotidien des commerces, des services publics, et des modes de vie des individus. Sans ressembler architecturalement ni à Paris ni à Londres, on retrouve à New York un mode de vie urbain propre aux grandes villes qui fait que nous ne ressentons pas de réel « dépaysement ».

Enfin, la familiarité est aussi celle que nous procurent les gens : non seulement nous avons été très bien accueillis par les collègues de Columbia, mais nous avons surtout rencontré beaucoup de Français.es qui, très vite, nous ont fait partager leur vie, leur exil temporaire, ou leur émigration réussie.

Evidemment, plein de choses sont différentes et nous échappent… à commencer par les ouragans et les chutes de neige en mars ! Plus sérieusement, nous avons par exemple encore un peu de mal à quitter l’actualité politique française pour nous plonger dans les débats américains (très dominés par l’actualité trumpienne…). La proximité de la richesse et de la pauvreté à Harlem nous dérange autant qu’elle nous interroge. Et le bruit des hélicoptères qui survolent la ville à 2h du matin n’est pas toujours rassurant ( !)

Les cités, à quelques mètres de l’Université
Un terrain…vague, à deux pas de chez nous

 

 

 

 

 

 

 

Je termine donc ce post sur le sentiment que sans avoir été particulièrement original, ce mois de mars à New York est donc aussi vite passé qu’il s’est très bien passé.

2 réponses à « New York : l’étranger familier »

  1. Après ce magnifique « Magical mistery tour  » acompagné de photographies superbes de NY et des bibliothèques somptueuses arrive cette notion de l’étranger familier !
    Cette notion nous rappelle un point essentiel de la « culture americaine  » à savoir le multiculturalisme tellement enrichissant , mais également le multicommunautarisme (Afro latino Sino Americain.e.s ) et ses aspects parfois négatifs car je ne suis pas certain que dans ce pays le « citoyen étranger  » bénéficie de la même mansuétude que « l’étranger familier « .
    America great again c’est moins d’un tiers de la population , et elle est surtout très blanche !
    merci pour ce blog très intéressant !

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